Dans son rapport de près de 300 pages publié en cette année 2023, rapport relatif à la “Situation des femmes dans les systèmes agroalimentaires”, la Fao, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, a fait le constat selon lequel, la création de systèmes agroalimentaires efficaces, inclusifs, résilients et durables est subordonnée à l’autonomisation de toutes les femmes et à l’égalité des genres. Dans cet article nous vous livrons une petite séquence du rapport. La deuxième partie d’une série…
“L’autonomisation des femmes est aussi un facteur déterminant pour les résultats économiques et sociaux. Les projets qui visent spécifiquement à autonomiser les femmes ont des retombées plus importantes que les projets dans lesquels on se contente d’intégrer les problématiques liées au genre. Plus de la moitié des programmes d’aide bilatérale consacrés à l’agriculture et au développement rural intègrent déjà ces questions, mais seuls 8,5 pour cent en font un objectif fondamental. Par conséquent, si la moitié des petits producteurs bénéficiaient d’interventions de développement qui étaient axées en priorité sur l’autonomisation des femmes, cela permettrait d’accroître de manière notable les revenus de 58 millions de personnes supplémentaires et de renforcer la résilience de 235 millions de personnes supplémentaires.
L’emploi des femmes dans les systèmes agroalimentaires
Les systèmes agroalimentaires sont de grands pourvoyeurs d’emplois pour les femmes. En 2019, 36 pour cent des femmes et 38 pour cent des hommes au sein de la population active travaillaient dans les systèmes agroalimentaires. Pour les premières comme pour les seconds, il s’agit d’un recul de 10 points de pourcentage environ depuis 2005, qui s’explique presque exclusivement par une baisse de l’emploi dans le secteur de la production agricole primaire.
Les systèmes agroalimentaires constituent une source de moyens de subsistance plus importante pour les femmes que pour les hommes dans de nombreux pays. En Afrique subsaharienne, 66 pour cent des emplois occupés par des femmes le sont dans les systèmes agroalimentaires, contre 60 pour cent de ceux occupés par des hommes. En Asie du Sud, les femmes travaillent en grande majorité dans les systèmes agroalimentaires (71 pour cent des femmes contre 47 pour cent des hommes), bien qu’elles soient moins nombreuses que les hommes dans la population active. Les systèmes agroalimentaires représentent une source essentielle d’emploi pour les jeunes femmes, en particulier celles âgées de 15 à 24 ans.
En général, les femmes occupent une part plus grande des emplois agricoles dans les pays moins développés sur le plan économique, dans la mesure où elles n’ont que très peu de possibilités d’exercer un emploi non agricole, et ce en raison d’un manque d’éducation, d’un accès limité aux infrastructures essentielles et aux marchés, d’une lourde charge de travail non rémunéré et de piètres perspectives d’emploi rural en dehors de l’agriculture. Les femmes représentent largement plus de 50 pour cent de la main-d’œuvre agricole dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne. Et dans plusieurs pays d’Asie du Sud-Est, dont le Cambodge, la République démocratique populaire lao et le Viet Nam, la moitié environ de la main-d’œuvre employée dans le secteur agricole est féminine.
Les femmes qui travaillent dans la production agricole le font généralement dans des conditions très défavorables. Ces travailleuses se concentrent essentiellement dans les pays les plus pauvres, où il n’existe pas d’autres débouchés, et doivent maintenir leur rythme de travail dans des contextes de choc météorologique dû au changement climatique ou dans des situations de conflit. Elles ont moins de chances d’accéder à l’entrepreneuriat ou au travail agricole indépendant et sont engagées dans la production de cultures moins lucratives. Souvent, les femmes sont cantonnées au travail familial non rémunéré ou à des emplois occasionnels dans l’agriculture. Les normes sociales peuvent aussi restreindre les possibilités qu’ont les femmes de se lancer dans la production agricole et de se livrer à des activités à dominance masculine. L’écart de productivité des terres entre des exploitations de même taille, selon qu’elles sont gérées par des femmes ou par des hommes, est de 24 pour cent. En moyenne, les femmes gagnent 18,4 pour cent de moins que les hommes dans le secteur agricole salarié; autrement dit, pour chaque dollar gagné par un homme, une femme ne reçoit que 82 centimes.
Le fait de délaisser la production agricole primaire au profit d’un emploi non agricole dans les systèmes agroalimentaires a toujours permis aux femmes comme aux hommes d’améliorer leurs conditions de vie. Cependant, les rôles dévolus aux femmes dans les segments non agricoles des systèmes agroalimentaires sont plus susceptibles d’être rattachés à des chaînes de valeur et des activités moins rentables ou d’être assortis de conditions moins favorables que pour les hommes en raison de normes sociales traditionnelles restrictives ou d’un accès limité aux biens et aux ressources”.