Le vice-ministre chinois de l’Agriculture Qu Dongyu est élu à la tête de la FAO, le 23 juin 2019 à Rome AFP/Archives
L’accession d’un Chinois à la tête de l’agence de
l’ONU pour l’alimentation (FAO) permet à la Chine de promouvoir son modèle
agricole productiviste, mais met en lumière ses dégâts environnementaux et son
appétit pour les acquisitions agroalimentaires, notamment en Afrique,
soulignent des experts.
Conseillé par l’économiste américain Jeffrey Sachs, de
l’Université Columbia, spécialiste de la lutte contre la pauvreté, le
vice-ministre chinois de l’Agriculture Qu Dongyu a, dès sa lettre de
candidature en janvier, cité la Chine en modèle pour avoir réussi à couvrir les
besoins alimentaires de base de sa population de 1,4 milliard d’habitants.
La FAO est la principale organisation internationale
chargée de lutter contre la faim dans le monde.
Avec des regroupements massifs d’exploitations
agricoles et une mécanisation accrue de la production, de 2006 à 2015, la
croissance de la production agricole en Chine s’est établie “en moyenne à
3,1%”, soit “environ un tiers au-dessus de la moyenne mondiale”,
confirme l’OCDE dans un rapport sur l’agriculture mondiale publié lundi.
Et celle de sa productivité agricole s’est élevée à
3,4% par an, soit plus du double de la moyenne mondiale.
Toutefois, alors que la Chine reste un importateur net
de produits alimentaires, la croissance “rapide et soutenue” de sa
propre agriculture exerce des “pressions de plus en plus fortes sur les
ressources naturelles, notamment sur les terres et l’eau”, avertit l’OCDE.
L’agriculture est le secteur qui utilise le plus d’eau
en Chine: 62% de la consommation totale, contre une moyenne de 42% en moyenne
dans le reste des pays de l’OCDE. L’indicateur de “stress hydrique”,
c’est-à-dire de sécheresse, y est deux fois supérieur à celui de la moyenne des
pays OCDE.
Le pays a commencé à réagir en cherchant à exploiter
des terres arables hors de Chine, notamment en Afrique, et en encadrant
rigoureusement les projets de conversion des terres agricoles à d’autres
usages.
Les surfaces agricoles chinoises ne pourront ainsi pas
descendre sous une “ligne rouge” officielle fixée à 124,3 millions
d’hectares, rappelle l’OCDE.
– “Echec total” face à la peste porcine –
La planification et l’organisation du secteur agricole
chinois, sous la houlette de M. Qu notamment, n’ont néanmoins pas suffi à
endiguer l’énorme épidémie de fièvre porcine africaine qui décime depuis l’an
dernier les élevages de porc en Chine. Avec des millions de porcs abattus, le
traitement par Pékin de cette épizootie qui bouscule les marchés mondiaux des
produits agricoles est “un échec total”, lâche à l’AFP une source
diplomatique européenne.
En Afrique, la Chine, qui a longtemps cru pouvoir
exploiter impunément les immenses terres disponibles pour réexporter chez elle
les récoltes de céréales de base, a été contrainte de revoir sa stratégie sous
la pression locale.
“A partir de 2006”, la Chine a
“encouragé” ses sociétés à investir dans le domaine agricole en
Afrique, expliquait à l’AFP en janvier Guo Pei, économiste et rédacteur en chef
de la China agricultural economic review, lors de la présentation du projet
Routes de la soie à Paris.
“A ce moment-là, des sociétés chinoises ont loué
des terres aux propriétaires locaux pour cultiver du riz et du maïs, mais cela
a créé des problèmes: d’abord ces mêmes pays africains n’ont pas suffisamment
de maïs et de riz pour eux. Et lorsque les récoltes étaient faites, dans
certains cas, il n’a pas été possible de les acheminer en Chine”, a-t-il
admis.
En conséquence, les compagnies agroalimentaires
chinoises investissent désormais dans des cultures à plus haute valeur ajoutée
en Afrique comme “le manioc, le sésame ou les fruits”: “Cela, on
le leur laisse exporter”, car ils ont créé des usines de transformation
qui emploient des salariés locaux, explique M. Guo.
Les ambitions agricoles de la Chine en Afrique ne s’arrêtent pas là: “pour améliorer la qualité des semences, nous sommes à la recherche de partenariats avec des instituts agricoles locaux. En Tanzanie, l’université de Pékin a déjà établi un centre de recherche conjoint”, a ajouté le chercheur.
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